
Tout près, à quelques maisons de chez moi, des ados se chamaillent en riant et s'enfuient en courant sur les galets ronds de la place de l'église, déserte à cette heure.
Derrière eux la porte de la batisse est ouverte, accueillant gouffre noir qui invite à la paix. Au dessus de l'orifice béant, des guirlandes lumineuses rouges et vertes dessinent une croix et une colombe... Le côté kitsche de l'invitation appelle la confiance...
Je suis parcourue d'une envie soudaine de franchir le pas... De me glisser dans l'humidité du lieu...
Quelques gospels en toge mauve, les corps lourds dodelinant en rythme, m'accueillent d'un large sourire.
Une petite vieille en robe noire se lève douloureusement de la chaise sur laquelle elle a posé ses genoux rocailleux depuis de trop longues minutes. Pas une grimace, juste la bouche un peu pincée, les yeux un peu plissés par l'effort qui la désincruste rudement de la prière.
Un curé rebondi, blanc, laiteux, comme s'il n'avait plus vu la lumière du jour depuis des siècles, troquée pour des illuminations divines sans doute, traîne le pas jusqu'à l'autel.
Les bougies sont toutes allumées dans la pénombre. Les flammes vascillent pour accompagner mon avancée discrète dans le déambulatoire.
Les uns continuent leur répétition lyrico-cahotico-harmonieuse, l'autre se courbe pour une méditation solitaire, la vieille dame est sortie...

Curieux univers propice à un long soupir, presque une prière ma main dans celle de mon fantôme... Perdue dans un tout petit coin caché de ma ville, pour la première fois depuis si longtemps, je m'écoute respirer...
Je crois que je vais m'asseoir... rester encore un peu...